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9 août 2008 6 09 /08 /août /2008 10:15

             Training à Ndego Training à Ndego 

              Nous y retournons! Cela fait exactement 4 semaines que nous avons découvert le petit village d’Humure au Sud du parc national d’Akagera. J’avais décrit mes impressions et ma joie de découvrir cette partie du Rwanda. C’est en effet sur les chemins de ce village que j’avais eu mon « déclic » et mes premières sensations de bonheur africain ! Cette fois-ci Cécile ne nous accompagne pas et nous serons seulement 3: Tanja, Ngabo et moi-même. Tanja a travaillé durant les semaines précédentes sur un concept pour « entraîner » les communautés ou nous voulons développer un projet. On parle de Training en général. Sous ce terme un peu vague on comprend l’échange d’idées, d’envies et la mise au point d’un projet, d’un tour en commun. Nous sommes tous excités à l’idée de retrouver les habitants si chaleureux de ce village mais aussi curieux de voir comment mettre la théorie en pratique. Si nous savons que les 20 pages du concept ne sont réalisables que dans un « perfect world » comme nous le disait notre boss avant de partir, nous espérons quand même avoir de bons résultats. Le lundi est occupé par la rédaction du programme, du budget et des courses pour les jours à venir. Il faut penser aux carnets et stylos à distribuer aux gens, au crédit de téléphone, aux nombreuses bouteilles d’eau, à un grand panneau pour que tout le monde puisse voir. Le DED (Deutsches Entwicklungsdienst – Service de développement Allemand) finance notre projet de A à Z.

 

            Le trajet aller n’a pas été de tout repos. Failli avoir un accident à cause d’un vélo un peu fou, puis la voiture qui à du avoir aussi peur que nous ne voulait pas redémarrer : deux heures d’attente dans un bled. Bref la mauvaise humeur a failli s’installer. Heureusement de succulentes brochettes, le sourire et l’accueil des gens sur le chemin ainsi que la beauté du paysage nous font reprendre du poil de la bête ! Cela fait déjà 4 fois que je passe par cette route mais je ne me lasse pas de regarder…j’aime tellement le rouge de la terre qui se mêle au vert des bananiers. La fleur d’une couleur particulière qui se détache du paysage, et le visage étonné des enfants qui hurlent « Musungo Komera » (blanc sois fort !! sorte de formule de bienvenue) Nous arrivons dans l’après-midi à Humure et Ramiro accueillis par l’équipe de Care International, dont Betty avec qui nous avions particulièrement sympathisé la dernière fois. En deux trois mouvements elle regroupe la vingtaine de personnes avec qui nous voulons faire le training et organise les journées à venir. Heureusement qu’elle nous apporte son aide, elle travaille ici depuis près d’une année et connaît le village comme sa poche. Pendant ce temps nous rencontrons Emmanuel, chargé de la sécurité économique aussi chez Care. Il nous explique son job ici : il visite chaque association et tente de leur apprendre ce qu’il nomme «la culture de l’épargne ». Comme il n’y a ni banque, ni institut de micro finance dans le coin (suite à une faillite généralisée en 2004) les gens tentent de s’en sortir par leurs propres moyens. Chacun amène une certaine somme chaque semaine (montant très modeste entre 50 et 200 FRW ce qui fait entre 5 et 20 centimes environ) et au bout de quelques semaines l’association a assez pour pouvoir faire crédit à l’un de ses membres. Le membre en question doit avoir expliqué son projet, ses plans et pourquoi il est important de lui accorder ce crédit. L’association décide ensuite à la majorité si on doit ou non lui accorder le prêt. Bien sur les projets restent à très petite échelle mais c’est intéressant de voir comme les gens veulent s’en sortir et sont solidaires. Le soir nous dormons dans le village d’en face. Pas d’électricité dans le village donc cuisine au feu de bois, avec tous les légumes locaux, un bout de chèvre…Betty nous accueille chez elle et nous mangeons là avec tous les gens de Care et deux étudiantes (une canadienne et une rwandaise) qui sont ici pour faire des recherches sur les réfugiés et pour évaluer l’efficacité du projet de CARE ici. C’est très chouette, nous échangeons sur divers sujets (« Quoi Tanja tu es athée ???? Comment fais tu pour vivre sans croire en rien ??? »), rigolons, j’apprends de nouveaux mots de kinyarwanda… et nous allons nous coucher déjà bien lessivées.

 

            7h30 premier repas de la journée. Je ne peux pas appeler cela un petit-déjeuner, ce serait faire offense aux croissants et au beurre. Ici on mange seulement deux fois par jour. Le matin avant 8 heures et le soir après 20heures. Et la même chose : un mix de patates, bananes, aubergines, haricots, poisson, viande, manioc, épinards, riz, pâtes selon l’humeur. Entre les deux un ou deux beignets aussi consistants qu’un brique du Chnord pour bien te caler. Donc je commence ma journée le ventre rempli de choux et de riz à la tomate. Il faut compter entre 30 minutes et une heure de retard à tout RDV. Ici n’échappe pas à la règle. La première journée sert à faire parler les gens. Sur leur village, ce dont ils sont fiers dans leur communauté, ce qu’ils aimeraient montrer à des gens de l’extérieur. Ils travaillent en petits groupes. Pleins de choses ressortent : la technique traditionnelle de fabrication du beurre, les habits confectionnés pour les bébés, la solidarité entre les personnes, leur histoire personnelle mouvementée entre la Tanzanie et le Rwanda. Nous mettons au point une carte du village ou chacun vient ajouter les endroits qu’il pense important ou dignes d’intérêt. L’après-midi est destinée aux rêves. Quels sont leurs projets pour le futur, leurs rêves (inzozi) ? On trouve de tout encore une fois, mais les rêves qui reviennent le plus souvent se situent au niveau de l’éducation pour les enfants (une école moderne dans le village…) et des moyens à disposition des coopératives. Nous identifions les projets qui concernent directement le tourisme et ceux qui sont réalisables à plus long terme.

 

A la fin de la journée, Betty nous emmène, Tanja et moi nous balader auprès du lac. Magnifique moment. Lumières de fin de journée, celles que je préfère. Les couleurs les plus belles que l’Afrique peut offrir : le vert des arbres et des roseaux, le jaune des herbes sèches, le rouge de la terre encore et toujours, les différents bleus du lac et du ciel. Des enfants nous accompagnent tout le long, pieds nus, habits troués, visages sales mais tellement souriants. Toujours prêts à rire, chanter, poser fièrement devant l’appareil photo puis s’enfuir en courant quand je mime de vouloir les attraper. Ils sont incroyables. Il y a aussi les chèvres qui soulèvent tant de poussière sur leur passage, les belles vaches rwandaises avec leurs cornes imposantes. Nous entendons les hippopotames mais impossibles d’en voir un de près. C’est peut être mieux comme cela. Les animaux du lac ne semblent pas toujours être les meilleurs amis des habitants : Betty nous raconte quelques histoires pas vraiment drôles. Deux heures de balade, encore un de ces moments si précieux ou je me sens au bout du monde, et pourtant dans une totale sérénité. En paix avec moi-même et le reste du monde. Ou on a l’impression qu’on a besoin de rien d’autre que cet endroit.

 

            La nuit est mouvementée, chambre presque sans ouvertures, gorge sèche, deux allers retours aux toilettes (petite vessie oblige après deux verres de thé), toilettes qui sont d’ailleurs dans un état pitoyable, je suis presque prête à rejoindre Pékin s’il y a une épreuve d’apnée au programme, et pour finir une de ces draches !! Avec un toit en tôle je peux vous assurer qu’il est impossible de fermer l’œil. Ou alors juste pour prier que le ciel ne nous tombe pas sur la tête ! Enfin bref !

 

            Dernier jour, second jour de training nettement moins productif j’ai l’impression. Peut-être parce que je me sens malade et pas dans mon assiette. Encore du retard, les gens sont lents et mous. Chacun présente son association, ce qu’ils pourraient proposer et ce dont ils ont besoin. Il y a de chouettes idées. Nous allons emmener les touristes voir comment les gens récoltent le miel dans des ruches maisons, comment on prépare du savon à base de fruits et d’herbes, comment le lait est utilisé par les gens, comment les femmes tissent des paniers et tricotent des habits pour les nouveaux-nés, comment le menuisier fabrique le jeu de bille traditionnel rwandais. Une vieille propose de monter une pièce de théâtre pour mettre en images leur vie de déplacés. On réfléchit à un endroit ou les faire manger, peut être même dormir. Idée de faire un feu de camp, de la danse, des contes. Nous notons les besoins de chacun, en temps et financiers. Les numéros de téléphone aussi. L’après-midi est déjà avancée et nous avons 4 bonnes heures de route pour rejoindre Kigali ce soir. Donc nous ne traînons pas et après avoir remerciés notre chère Betty et pris congé de tous les gens, nous repartons à la maison, le corps plein de fatigue et, je dois avouer, contents de retrouver le confort de la ville. Mais la tête aussi remplie de bonnes choses et plus que jamais l’envie dans le cœur de mener ce projet à bout pour que les gens de cette communauté puissent en toucher des bénéfices. Nous projetons de revenir dans 3 ou 4 semaines, histoire de réfléchir entre temps à ce que nous pouvons faire comme tour, quelles sont les possibilités financières, faire des recherches de fond sur la question des réfugiés, peut être aussi faire un peu de marketing research. Enfin il y a encore du boulot !

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commentaires

P
il a le temps lui de mettre des commentaires, toujours en vacanes le JF.. quant a nous, on fait de l' humanitaire au sud de lyon, ca s' appelle givors!...; plein de bises marine, je lis regulierement tes textes, c' est vraiement sympa. ici, tout va bien, arthur commence a avoir du poil aux pattes. a bientot
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J
Ah, enfin, je croyais qu'internet était coupé au Rwanda comme en Chine...<br /> Business plan, bénéfices etc Menez vous une reflexion à NDA sur l'impact que ces notions peuvent avoir sur le long terme sur les villages leur culture, leur mode de vie et sur la solidarité que tu dis rencontrer à chaque virage....? Ca m'interesserait de connaitre le fruit de vos cogitations...<br /> Si tu passes en Tanzanie et que tu vois des blancs blancs (assez bronzés tout de même) fais leur signe, c'est peut être nous...
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M
<br /> Heureusement que tu es là pour mettre des commentaires sinon ce blog serait bien vide:)<br /> Oui oui il y a une vraie réflexion menée ici sur les effets positifs et négatifs que notre action peut engendrer dans les communautés. Etant donné que NDA a été crée il y a seulement une année, il<br /> est encore difficile de mener une évaluation concrète et satisfaisante. Mais nous y travaillons: dans quelle mesure laissons nous une trace durable dans ces communautés? Notre action<br /> contribue-t-elle vraiment à aider les gens à sortir de la pauvreté?<br /> De plus nous appuyons sur plusieurs choses en meme temps: sur l'esprit d'initiative et d'entreprise individuel où nous explicitons bien que nous sommes là pour donner un coup de pouce, des méthodes<br /> logistiques, un savoir de management mais en aucun cas pour distribuer de l'argent comme le ferait une ONG. Donc si nous faisons un crédit, il doit etre remboursé, meme si cela est sans intéret.<br /> Parallèlement nous encourageons les initiatives collectives, et de solidarité à l'intérieur des communautés: pour chaque visiteur, une somme spécifique est versée à un ou plusieurs "fonds"<br /> (communautaire, d'éducation, de santé). Cet argent est destinée à la communauté en tant que groupe. Et bien sur il s'agit de projets en commun. Nous ne décidons jamais seuls de proposer telle ou<br /> telle activité. Il s'agit de privilégier l'échange, meme si bien sur cela n'est pas toujours évident de trouver un équilibre.<br /> Le défi semble de trouver un moyen d'aider ces communautés à se développer, à s'enrichir sans pour autant abandonner ce qui fait leur richesse (culture, solidarité etc..). Je crois que cela est<br /> possible, il faut pour cela que les gens soient conscients de ces richesses (et fiers de leurs traits culturels et sociaux) et que l'échange avec les touristes soit basé le plus possible sur<br /> l'interaction et le respect mutuel (ne pas voir les rwandais comme des autochnones amusants et ne pas voir les touristes comme des portefeuilles sur patte).<br /> <br /> Je pense que NDA va sérieusement se pencher sur l'évaluation de son action dans les prochains mois. Cela est d'ailleurs fondamental pour continuer.<br /> <br /> Vous etes déjà en Tanzanie les guillaud?? Profitez en bien  bande de muzungo<br /> <br /> <br />

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Bienvenue sur ce blog où tu pourras suivre mes aventures africaines pendant 3 mois au Rwanda. 
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Bonne lecture et à très bientôt..



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